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Demande de mise en liberté et droit de se taire : précisions de la Cour de cassation

Pénal - Procédure pénale
26/02/2021
Dans un arrêt du 24 février 2021, la Haute juridiction revient sur le fait que le droit de faire des déclarations, de répondre aux questions posées ou de se taire doit être porté à la connaissance de la personne qui comparaît devant la chambre de l’instruction saisie du contentieux d’une mesure de sûreté. Néanmoins, les déclarations de l’intéressé ne pourront être utilisées à son encontre par les juridictions devant se prononcer sur un renvoi devant la juridiction de jugement ou une déclaration de culpabilité.
Un homme est mis en examen et placé en détention provisoire. Il présente une demande de mise en liberté. Elle est rejetée par le JLD. Il interjette appel de cette décision.
 
Il est précisé que la chambre de l’instruction a entendu la personne mise en examen, ayant demandé à comparaître devant elle, « sans l’informer de son droit de faire des déclarations, de répondre aux questions posées ou de se taire ».
 
L’intéressé décide de former un pourvoi en cassation arguant d’une méconnaissance des articles 199 du Code de procédure pénale et 6 de la CEDH.
 
La Cour de cassation rappelle : « Il se déduit des articles 6 de la Convention européenne des droits de l’homme et préliminaire du Code de procédure pénale qu’une juridiction prononçant un renvoi devant la juridiction de jugement ou une déclaration de culpabilité ne peut tenir compte, à l’encontre de la personne poursuivie, de déclarations sur les faits effectuées par celle-ci devant cette juridiction ou devant une juridiction différente sans que l’intéressé ait été informé, par la juridiction qui les a recueillies, de son droit de se taire, lorsqu’une telle information était nécessaire ».
 
Elle avait, dans un arrêt du 7 août 2019, jugé que cette information n’avait pas à être donnée lors d’une audience portant sur la détention provisoire de la personne mise en examen, son audition ayant pour objet d’examiner la nécessité d’un placement ou maintien en détention et non d’apprécier les indices pesant sur elle (Cass. Crim., 7 août 2019, n° 19-83.508). Néanmoins, elle considère désormais que la chambre de l’instruction doit, à chacun des stades de la procédure, « s’assurer, même d’office, que les conditions légales des mesures de sûreté sont réunies, en constatant expressément l’existence d’indices graves ou concordants rendant vraisemblable la participation comme auteur ou complice de la personne mise en examen à la commission des infractions dont le juge d’instruction est saisi » (Cass. Crim., 27 janv. 2021, n° 20-85.990, v. Détention provisoire ordonnée à la suite d’une révocation du contrôle judiciaire et motivations, Actualités du droit, 29 janv. 2021).
 
L’intéressé peut donc être amené à faire des déclarations qui sont susceptibles d’être prises en considération par les juridictions prononçant un renvoi devant une juridiction de jugement ou une déclaration de culpabilité. « Il résulte de ce qui précède que le droit de faire des déclarations, de répondre aux questions posées ou de se taire doit être porté à la connaissance de la personne qui comparaît devant la chambre de l’instruction saisie du contentieux d’une mesure de sûreté » souligne la Haute juridiction.
 
Cependant, la chambre n’a pas à statuer sur le bien-fondé de la mise en examen, qui relève d’un contentieux distinct de celui des mesures de sûreté. Le défaut d’information du droit de se taire est donc « sans incidence sur la régularité de la décision rendue en matière de mesure de sûreté ». Néanmoins, les déclarations de l’intéressé ne pourront être utilisées à son encontre par les juridictions devant se prononcer sur un renvoi devant la juridiction de jugement ou une déclaration de culpabilité.
 
Conclusion : aucune conséquence sur la régularité de la décision ayant confirmé le rejet de la demande de mise en liberté ne peut être tirée. 
 
Rappelons également qu’une question prioritaire de constitutionnalité a été renvoyée au Conseil constitutionnel le 9 février 2021 sur les dispositions de l’article 199 du Code de procédure pénale (v. Chambre de l’instruction et droit de se taire : des QPC renvoyées, Actualités du droit, 12 févr. 2021).
 
Source : Actualités du droit